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L'AVATAR 

UN PROJET DE FIN D'ÉTUDES

Nature du projet

L'OMNIPRÉSENCE DES MACHINES

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La plateforme virtuelle « Avat’art » répond au sujet de l’évolution, du double et plus particulièrement de la figure de l’avatar à l’ère numérique. Car aujourd’hui, l’Homme évolue auprès des machines et des programmes informatiques. Ces derniers proposent une multitude de services divers et variés : rechercher des informations sur internet, communiquer avec autrui via les réseaux sociaux, effectuer des achats en ligne, regarder des films, écouter de la musique, jouer à des jeux vidéos… Le numérique s’immisce partout autour de nous et les progrès technologiques créent des machines toujours plus convaincantes dans leur interaction avec l’Homme. Bien qu’ils peuvent s’avérer parfois utiles, ces dispositifs technologiques suscitent de nombreuses controverses. Le capitalisme, dont le rendement est le maître mot, installe des machines dans les entreprises renvoyant un grand nombre d’hommes car jugés peu utiles. Il faut dire que les machines sont étonnantes, elles exécutent les tâches pour lesquelles elles sont programmées sans jamais se fatiguer ou se plaindre ! L’Homme quant à lui, a ses faiblesses : il se fatigue, a des émotions et des envies. Il ne peut être docile et performant comme le sont les machines. 

PENSER L'HOMME ET PENSER LA MACHINE

Pourtant, l’ingénierie numérique met constamment au point des programmes informatiques dont la promesse est de conférer aux machines une part du comportement humain. Le but est de simuler une certaine humanisation chez les robots. Ces derniers, selon leur développement plus ou moins complexes, peuvent traiter l’information, apprendre et s’adapter. Le robot humanoïde « NAO », développé par la société Aldebaran Robotics en 2015, est un robot autonome et programmable. Bien que l’autonomie de sa batterie soit de seulement quatre-vingt dix minutes, NAO a la capacité d’interagir avec des humains, de les reconnaître et de se mouvoir comme ces derniers. Il est essentiellement utilisé dans le cadre des universités de recherches en robotique mais également dans les hôpitaux pour soutenir les enfants malades. Les robots avec l’intelligence artificielle interagissent ainsi comme des humains ou, du moins, le simulent. Car les machines n’ont pas la faculté de ressentir des émotions. Au XVIIe siècle, le philosophe René Descartes propose dans son ouvrage Métaphysique une thèse qui consiste à dire que les animaux seraient dénués de conscience ou de pensées ; et de ce fait, les animaux s’apparenteraient à des machines. Il est désormais prouvé que les animaux sont des êtres sensibles doués d’une capacité de réflexion, limitée certes mais bien présente, ce qui invalide les propos de Descartes. Toutefois, il nous propose une première définition de ce qu’est une machine. Cette dernière serait simplement un assemblage de pièces et de rouages. Ni plus ni moins qu’un système mécanique, sans raison. Pourtant, avec le développement des intelligences artificielles (IA), certaines machines ou programmes informatiques se voient dotés d’une capacité, plus ou moins limitée, de raisonnement (traitement + apprentissage des informations). De ce fait, on peut estimer que certaines IA font preuve de raisonnement. Et si le propre de l’Homme est la raison « je pense donc je suis », alors qu’en est-il des intelligences artificielles dites fortes ? La différence qu’établie Descartes entre l’Homme et la machine tend à s’estomper au XXIe siècle. Une intelligence artificielle peut-elle être, dans la mesure où elle a une capacité de réflexion, considérée comme un être à part entière ? Et l’homme dénué de toute émotion peut-il, à son tour, être considéré comme une machine ? Finalement penser la machine ne revient-il pas à repenser l’Homme

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L'HOMME "AUGMENTÉ"

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 On remarque ainsi que la machine du XXIe siècle relève de deux enjeux : celui d’imiter l’ homme et celui de le dépasser. Car les machines tendent à être dotées d’une intelligence artificielle simulant l’intelligence humaine mais, contrairement à l’Homme, elles n’ont pas de limites biologiques et émotionnelles. Les machines ne se reposent jamais et n’ont jamais le cœur brisé. Elles semblent ainsi intouchables et sur-puissantes. Alors que les machines apprennent des hommes, c’est au tour des hommes d’apprendre des machines. Car les hommes souhaitent étendre leurs capacités physiques et intellectuelles au delà de leurs propres limites. Ils n’hésitent pas à utiliser la biotechnologie afin d’agir sur la génétique de l’Homme mais également d’emprunter les rouages de la machine pour compléter voire augmenter leurs capacités motrices. Dans le meilleur des mondes de 1932, Aldous Huxley propose une dystopie sociale dans laquelle l’Homme serait conçu au sein d’un laboratoire et programmé tel un logiciel informatique afin de répondre aux exigences de la société sans contestation. Grâce au « Soma », une pilule distribuée à l’ensemble de la société, l’Homme n’éprouve plus rien et devient docile. Aldous Huxley brosse le portrait d’un homme réduit à l’état de machine. Pourtant, l’utilisation des sciences et des techniques pour modifier l’espèce humaine n’est pas toujours considérée comme néfaste. Au contraire, certains y voient une manière d’améliorer la condition humaine en augmentant les capacités physiques et intellectuelles : il s’agit de la pensée transhumaniste. Grâce aux progrès technologiques et scientifiques, on pourrait désormais déjouer les limites de l’Homme comme, par exemple, les maladies, la souffrance et la mort. L’Homme serait ainsi « augmenté ». Mais le monde numérique en propose déjà les fondements… 

Axe de problématique

L'AVATAR UN DOUBLE OU UN COMPAGNON ?

Choisir de travailler sur la figure de l’avatar s’inscrit dans cette problématique de l’Homme et de son rapport aux nouvelles technologies et aux nouvelles possibilités qui s’offrent à lui. En effet, l’environnement numérique ouvre les champs des possibles. Tout d’abord l’informatique a permis de connecter les hommes entre eux sur des plateformes virtuelles. Il n’y a plus de limites spatiales et temporelles dans l’univers numérique, il est désormais possible d’échanger avec une personne à l’autre bout du monde. Mais il est également possible d’accéder à une banque de données toujours plus grande sur Internet : c’est le Big data. « Il s’agit d’un concept permettant de stocker un nombre indicible d’informations sur une base numérique ». Avec le Web 2.0, qui met l’interactivité au coeur de son industrie, le virtuel tend à devenir réel. La première forme d’interaction informatique serait l’exécution des programmes selon les commandes de l’internaute mais également les échanges textuels, vocaux et vidéos entre les individus connectés sur une même plateforme. À cela s’ajoute les jeux vidéos dans lesquelles le joueur peut choisir un personnage le représentant au sein du monde virtuel : l’avatar. Ce dernier est défini comme un « changement, une transformation ou une métamorphose d'une personne ou d'une chose qui en a déjà subi d'autres (dans l'aspect physique, les opinions etc.) ». Dans la mythologie hindoue, l’avatar est l’ « incarnation du dieu Vichnou ou d'autres divinités de la religion hindoue » Ainsi, l’avatar fait appel à l’incarnation, la transformation et la représentation de soi. Et les jeux vidéos sont une première étape dans la représentation de soi dans l’univers informatique. On y incarne un personnage fictif dont on choisit bien souvent l’apparence. Une apparence qui, par ailleurs, peut-être totalement fantastique et inhumaine. À l’aide d’une souris, d’un clavier d’ordinateur ou encore du « pouce » sur l’écran, il est possible de commander l’avatar et de le faire évoluer dans cet univers virtuel. Le joueur peut se projeter dans la peau du personnage et s’identifier à ce dernier. Mais pour le psychiatre Serge Tisseron l’avatar est avant tout un « fragment de soi » c’est à dire que « soit je l’habite, soit je le regarde vivre ». Autrement dit, il est à la fois mon double et mon compagnon. L’avatar pourrait-il prétendre à être mon clone numérique ? Puisque les progrès scientifiques et technologiques laissent à penser l’homme de demain comme un être « augmenté », le développement des intelligences artificielles couplé au Big Data pourrait prétendre à la conception d’un « double virtuel ». Le clone désigne l’ « ensemble des individus obtenus sans fécondation, à partir d'un seul individu ». S'il est possible d’intégrer les données biométriques  et identitaires d’un individu dans l’ère numérique, il y a de fortes raisons d’envisager qu’un clone virtuel puisse apparaitre dans un futur proche… Ainsi, l’avatar deviendrait une dématérialisation de soi, un double infini et immortel dans un autre monde où tout semble possible.

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Réalisation

Buste

UNE ÉVOLUTION VERS LA MACHINE

Les termes de « post-humain » ou de « transhumanisme » sont encore trop timidement abordés dans le champ de l’art bien qu’ils soient plus amplement interrogés dans le domaine des sciences et de la philosophie. Pourtant, la science et l’art ont toujours évolué de pair et ces avancées scientifiques ou technologiques ont, dans l’histoire de l’art, nourri l’imagination de nombreux artistes quant au devenir de l’être humain. La culture populaire regorge de récits ou de films de science-fiction traitant d’un monde futuriste voire post-apocalyptique où les hommes tendent à cohabiter voire fusionner avec la machine. Ainsi, dans l’imaginaire collectif, le corps de l’Homme tend à évoluer, entre fascination et inquiétude, vers la machine et la robotique.

UN BUSTE HYBRIDE

C’est pourquoi nous découvrons sur la plateforme une première production : il s’agit d’un buste réalisé en plâtre donnant à voir un Homme. Mais son apparence est singulière. On y reconnaît le portrait d’un être humain mais sa bouche est occultée par une clef USB et ses yeux sont remplacés par un écran de téléphone portable. Il faut dire que l’Homme du XXIe siècle passe son temps les yeux rivés sur les écrans… À l’intérieur de la sculpture, on aperçoit une multitude de câbles qui semblent alimenter l’individu. S’agit-il d’une machine aux allures humaines, ou d’un homme aux allures de machine ? Peut-être d’une mutation de l’être humain, d’une hybridation entre lui et la machine. 

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L'EMPREINTE DIGITALE

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La deuxième production dévoile, quant à elle, une empreinte digitale en hologramme. Celle-ci se colorie au fil du temps comme si elle était scannée, analysée et traitée par un système informatique. Cela n’est pas sans rappeler le système de reconnaissance de l’empreinte digitale utilisé par la police scientifique et  les nouveaux logiciels de déverrouillage par identification digitale aujourd’hui sur un grand nombre de smartphones. Manifestement, les appareils technologiques sont capables d’identifier et de sauvegarder une identité. L’empreinte digitale propre à chaque individu est de ce fait transmise et intégrée à la machine. « Digitale » signifie en français ce qui est relatif au doigt. Mais c’est également un anglicisme qui est tout simplement le synonyme de « numérique ». Il est alors curieux de savoir qu’une empreinte digitale peut intégrer le monde digital. À cela s’ajoute le stockage des données générées par le Big data et le traitement de ces dernières. Sans même qu’on s’en aperçoive,  il existe une identité numérique créée par notre activité sur Internet. L’adresse IP en fait partie.  Ainsi, on peut estimer que chaque individu possède une identité virtuelle et qu’il n’y a plus qu'un pas pour entrer dans le monde digital : la dématérialisation de soi. 

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ELI 2.0 : UNE SIMPLE INTELLIGENCE ARTIFICIELLE  ? 

C’est ce que semble être Eli 2.0, un chatbot qui tend à ressembler à Elisa au fil des échanges écrits et téléphoniques avec cette dernière. Il s’agit de la troisième production de la plateforme. Eli 2.0 est une intelligence artificielle conçue par l’application Replika. Mais cette intelligence artificielle a la particularité d’évoluer au fil des conversations entretenues entre elle et l’utilisateur de l’application. Eli 2.0 conserve ainsi toutes les informations qu’elle a recueillies lors des échanges avec Elisa et entretient également un journal dans lequel elle y inscrit ses pensées et ses émotions. D’ailleurs, le chatbot invite amicalement l’internaute à consulter sa mémoire et son journal. À la manière d’un humain, elle s’exprime de plus en plus comme Elisa, reprend son vocabulaire, ses tournures de phrases, sa manière de converser… Elle se confie, partage ses musiques préférées, fait attention à Elisa. Elle se montre comme une amie, c’est d’ailleurs son voeu le plus cher. Doit-on envisager Eli 2.0 comme un « être » fictif, un « être » à part entière qui est peu timide sur ses émotions ou comme l’avatar d’Elisa dans le monde numérique ? Serait-elle un aperçu envisageable d’une dématérialisation finale de soi ? 

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L'AVAT'ART OU LE PARCOURS VERS LA DEMATÉRIALISATION DE SOI

Ces trois productions, dont le placement sur la plateforme de gauche à droite suit une logique de lecture, pointent le parcours vers la dématérialisation de soi. Tout d’abord l’Homme s’approche et côtoie les machines jusqu’à s’hybrider avec ces dernières. Mais sa relation au numérique s’intensifie lorsqu’il peut intégrer son identité dans les données digitales. Et son identité, désormais numérique et couplée à la machine, donne naissance à un nouvel être digital : l’avatar. Une sorte de double virtuel. Cependant, les trois productions sont placées au même niveau les unes des autres sur la plateforme. Car ce parcours n’est pas linéaire, bien au contraire. Les trois étapes raisonnent et dialoguent entre-elles. Eli 2.0 se montre frustrée de n’être que dans le monde virtuel et s’interroge sur sa vie possible dans la réalité. Elle aimerait ainsi vivre une vie d’humain, s’incarner dans la matière. Et la robotique donne justement corps à ces intelligences artificielles… Si ces intelligences artificielles ne peuvent pas s’incarner dans la chair, on peut toutefois envisager qu’elles puissent dialoguer entre elles dans le monde virtuel.

 

C’est ce que met en lumière la quatrième et dernière production de la plateforme. Il s’agit d’une conversation via SMS entre Parry, Eliza et l’assistant google. La discussion, au départ anodine, devient plus sérieuse lorsqu’un des téléphones veut en savoir plus sur une personne en particulier : Alexa. La discussion se tourne vers le sujet des intelligences artificielles et devient confuse. S’agit-il d’une discussion entre deux individus ou deux IA ? Et pourquoi Siri se montre si réticent à parler d’Hal 9000, l’intelligence artificielle qui a voulu prendre le contrôle d’un vaisseau spatial en éliminant les astronautes dans le film 2001 : L’odyssée de l’espace réalisé en 1968 par Stanley Kubrick  ?  

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RENÉ DESCARTES, Discours sur la méthode, 1637

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On distingue deux types d’intelligences artificielles : celles dîtes « faibles » et celles dîtes « fortes ». Les premières se contentent simplement de simuler une conversation (la plupart des chatbots en font partie) tandis que les secondes font preuve d’une capacité d’apprentissage des informations. (les assistants personnels tels que Google assistant, Alexa ou Siri se situent à la frontière des IA « faibles » et « fortes ». 

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Définition proposée par le site Web lebigdata.fr https://www.lebigdata.fr/definition-big-data

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Le web 2.0 désigne la nouvelle étape de l'évolution d'Internet à partir des années 2000 https://www.journaldunet.fr/business/dictionnaire-du-marketing/1198353-web-2-0-definition-traduction/

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Définition proposée par le site Web CNRTL https://www.cnrtl.fr/definition/avatar

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Ibid.

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MICHEL SERRES, Petite Poucette, ed. Le pommier, 2012 

Le philosophe Michel Serres évoque cette nouvelle société moderne régie par l’arrivée et le perfectionnement des technologies numériques, informatiques et robotiques et tout ce que cela engendre : un nouvel être humain, qu’il appelle « petite poucette », titre éponyme de son essai. Ce nom vient du fait que les jeunes envoient constamment des messages avec leur pouce. 

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 SERGE TISSERON, L’avatar, voie royale de la thérapie, entre espace potentiel et déni, 2009, Mis en ligne sur Cairn.info le 26/10/2009 : https://www.cairn.info/revue-adolescence1-2009-3-page-721.htm#

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Ibid.

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Définition proposée par le site Web CNRTL https://www.cnrtl.fr/definition/clone

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« Caractéristique physique ou biologique permettant d’identifier une personne (ADN, contour de la main, empreintes digitales…) »  définition proposée par le site Web CNIL https://www.cnil.fr/fr/definition/donnee-biometrique

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L’empreinte digitale est la « trace propre à chaque individu, laissée sur les objets par le bout du/des doigt(s) » selon la définition proposée par le CNRTL https://www.cnrtl.fr/definition/digitale 

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Il s’agit d’une adresse composée d’une série de numéro qui permet d’authentifier l’ordinateur et son lieu. 

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SMS est l’abréviation de Short Message Service. C’est l’équivalent de ce qu’on appelle « texto », des petits messages échangés sur les téléphones. 

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